Bannir les pantalons et de ne porter que des robes ou des jupes (N°34)
En avril 2010, j’ai subi une laparoscopie et au réveil de l’opération j’ai immédiatement senti que je n’avais plus de sensibilité au niveau de la jambe droite.
Mon médecin était très étonné car selon lui ce problème ne lui était jamais arrivé avant. Il me disait que ça allait revenir et qu’il ne fallait pas s’inquiéter, d’une part parce que j’avais de la force dans la jambe et d’autre part parce qu’à ce moment là je n’avais pas de douleurs. De plus, il ne comprenait pas pourquoi j’aurais pu perdre de la sensibilité au niveau d’un membre inférieur alors qu’il m’avait opéré au ventre.
Au deuxième jour d’hospitalisation, j’étais contente car je ressentais des picotements et je pensais que finalement tout allait rentrer dans l’ordre. Mal m’en a pris d’avoir eu l’audace de me réjouir si vite. Les picotements étaient le commencement de douleurs indescriptibles. Elles sont arrivées aussi brutalement qu’inattendues. Piqûres, brûlures, déchirures, coups de poignard et j’en passe….. Et toujours pas de sensibilité sur toute la cuisse.
C’était vraiment paradoxal comme situation, j’avais mal et n’avais pas de sensibilité au touché. J’expliquais ça aux infirmières, à mon médecin ou à mon entourage et je voyais bien qu’on me regardait bizarrement. Dans l’esprit des gens, on ne peut pas avoir mal et ne rien sentir en même temps. C’était une situation qui n’était pas « logique ».
Trois semaines plus tard, mon médecin m’a prescrit des vitamines B9 « Elevit ». J’ai suivi son traitement et en parallèle j’ai essayé l’acupuncture. Rien n’a marché. Les douleurs étaient toujours aussi intenses et je commençais à fatiguer, à avoir le moral en baisse.
D’habitude on dit de moi que je suis un «petit rayon de soleil », mais petit à petit je suis devenue malgré moi plus irritable et à fleur de peau. Je repoussais même ma fille dès qu’elle voulait venir me faire un câlin trop près, de peur qu’elle me touche ou plutôt qu’elle frôle ma jambe. Je ne pouvais plus la prendre sur mes genoux et ça c’était très dur pour moi. Même la nuit je ne supportais plus mon duvet et je ne pouvais pas dormir sur le côté droit.
Nous sommes partis en vacances en juillet en Turquie et je n’ai pas pu nager. La pression de l’eau me faisait trop mal. A mon retour, à force de répéter à mon médecin que j’avais mal et toujours pas de sensibilité, il m’a envoyé chez un neurologue début août. Avant d’y aller j’ai quand-même voulu savoir ce qu’il s’était passé durant l’opération pour que tout ça m’arrive ou du moins pour essayer de comprendre. Rien, pas de réponse, j’attends toujours… Pour lui il ne s’est rien passé, il ne comprend pas il a cherché des explications où il n’y en avait pas (une év. hernie discale), donc je ne saurais jamais le fin mot de l’histoire et pourtant à ce moment là j’aurais juste eu besoin qu’il me dise c’est arrivé, « on » s’excuse.
Bref, j’étais contente d’aller chez le neurologue, il pourrait sans doute faire quelque chose pour moi. Il faut rester positif dans la vie. Il m’a fait quelques tests et m’a dit que j’avais une méralgie paresthésique du nerf fémoral et qu’il n’y avait rien à faire, sauf à aller mettre un cierge à Bourguillon et prier bien fort. Voilà, le moral redescend au plus bas, vous repartez de là en prenant votre voiture, en mettant votre ceinture de sécurité qui fait très mal car elle appuis sur l’aine une partie de votre corps également douloureux et vous vous dites que vous devrez vivre avec et essayez d’apprivoiser cette douleur mais que ce n’est pas gagné.
Mes seuls soutiens pendant ces moments pénibles ont été mon compagnon et ma sœur. Les autres ne comprenaient toujours pas. Ils me disaient, tu sais, tel avait la même chose et ça a passé après 1 mois, mais moi, je m’en fichais des autres, c’est moi qui souffrais, c’est mon corps qui était blessé et chacun est différent. Et qui me disait que l’autre avait la même chose ?
Je sais au fond de moi que je n’ai pas trop le droit de me plaindre, il y a bien pire que moi. Des gens qui souffrent beaucoup plus. J’en ai côtoyé pas mal quand je faisais ma radiothérapie au CHUV il y a environ 8 ans et ça m’a appris à être plus forte et à ne pas trop me plaindre. Alors j’essayais de faire bonne figure devant les autres, à ne rien laisser paraître quand la douleur était plus forte ou quand on me touchait la cuisse.
Mon ami était en traitement chez le chiropraticien Aymon et je lui ai demandé de lui posé la question s’il pensait pouvoir faire quelque chose pour moi. Un rdv a été pris et dès le 1er contact il m’a de suite parlé de Monsieur Spicher et prit un rdv au Centre de rééducation sensitive de la Clinique Générale.
Enfin une lueur d’espoir à mon entretien lorsque Monsieur Spicher m’a dit qu’il y avait quelque chose à faire pour ma jambe! Mais ce qui m’a le plus surprise c’est qu’il connaissait tout de mes douleurs avant même que je lui en parle. Il pouvait me les décrire comme si c’était lui qui les subissait, c’était dingue ! Trop fort….. Par contre quand il m’a expliqué que je devais utiliser une peau de lapin pour commencer la thérapie, là j’ai hésité entre piquer un fou rire ou partir en courant.
Ensuite en lisant les newsletters, j’ai mieux compris les techniques utilisées par les thérapeutes pour dans un premier temps diminuer les douleurs pour pouvoir ensuite traiter la sensibilité de la peau.
Monsieur Spicher m’a conseillé de bannir les pantalons et de ne porter que des robes ou des jupes ! Encore une « torture » de plus pour moi. Je n’en portais jamais ou très rarement ! Il m’a fallu 10 jours pour me décider à aller faire les boutiques avec ma sœur. C’était la galère ! On ne s’imagine pas à quel point un problème aussi bénin que vestimentaire peut psychologiquement être aussi dur. Bref, je pouvais bien mettre une jupe le week-end, mais au travail c’était quelque chose d’insurmontable pour moi. Je l’ai quand-même fait et les résultats ne se sont pas faits attendre, sans trop de pression sur ma jambe j’avais moins mal et surtout moins de décharges électriques. En parallèle j’utilisais ma peau de lapin sur une zone « saine » proche de ma jambe.
Madame Della Casa m’a expliqué que je ne devais plus toucher ma jambe et que lorsqu’elle me grattait, ce qui m’arrivait souvent, il fallait gratter la peau de lapin ou autre chose (souvent le dos de mon fils). Même sous la douche il était conseillé de ne pas toucher la zone sensible. En résumé, il était important de faire comme si cette partie du corps n’était pas là. Ca n’a pas toujours été facile d’ignorer cette cuisse, mais j’ai appliqué au mieux ces règles.
Dès que les douleurs ont bien diminué, nous avons commencé à toucher la cuisse. C’était de nouveau très surprenant comme technique. J’ai pu choisir les tissus que j’emploierais pour la toucher. Avec l’aide de M. Spicher j’ai choisi un foulard, une patte pour essuyer les lunettes et un mouchoir en papier. Le traitement consistait au début à passer le tissu sur les zones définies. Peu de temps et assez souvent et plus le traitement avançait, le temps se prolongeait mais je devais le faire moins souvent. A chaque rendez-vous on contrôlait si la sensibilité revenait et en même temps je sentais bien que les douleurs qui n’avaient pas complètement disparues avec la peau de lapin diminuaient de fois en fois.
Et voilà, la fin du traitement est arrivée en mars 2011. Grâce à Monsieur Spicher et à Madame Della Casa, j’ai enfin retrouvé MA jambe, c’est vraiment le jour et la nuit entre ma première visite à la Clinique Générale et aujourd’hui. Je les remercie vivement pour tout ce qu’ils ont fait pour moi et leur dédie un petit rayon de soleil pour ce commencement du printemps.
Coralie Gobet