MODULE niveau 4 – 2023 Rencontre de 24 RSDC® dans le cadre deleur re-certifiation

Nicole Fayet et Géraldine Denoël, RSDC®

Dimanche soir 5 février dernier, les battements du cœur de la vie au Centre de rééducation sensitive des douleurs à Fribourg pulsent au rythme des arrivées successives des intervenant·es et des participant·es RSDC© au Module niveau 4 venu·es du Brésil, du Canada, de France, du Luxembourg et de Suisse.

Lumières douces, vins et boissons choisis avec délicatesse, délicieuses gourmandises et potages préparés par la famille de Claude, chaleureuses rencontres et retrouvailles nous souhaitent la bienvenue. Tout a été organisé avec enthousiasme, bienveillance pour que chacun·e se sente attendu·e, et accueilli·e. Le fil conducteur de notre formation à venir est ainsi déjà subtilement suggéré : prendre en soins nos patients plus complexes, prendre soin de l’autre, prendre soin de nous.

Photographies :
Géraldine Denoël RSDC® -GD

L’objectif au programme de ces trois journées, jalonnées de temps de formation, de tables rondes, d’observations silencieuses de dix-huit séances et d’échanges sur le forum.neuropain.ch, était d’actualiser nos connaissances de la méthode de Rééducation Sensitive de la Douleur (RSD) et de faire évoluer notre pratique.

Sous cet énoncé un tantinet académique se cache un contenu autrement plus savoureux qui a la particularité de nous rappeler que le mouvement, c’est avant tout de permettre de produire de l’intelligence. Il s’agit d’accepter de bouger nos convictions, d’affronter nos incertitudes, de relier le singulier à l’univers. Mais aussi de se poser des questions sur nos attitudes thérapeutiques, notre posture, nos modes de pensées et leurs conséquences sur nos actes.

« Nouvelles stratégies thérapeutiques pour la consultation de la douleur » - Prof. Sibele de Andrade Melo Knaut

Table ronde

« Comment être éthique sans se fatiguer ? » - Marc Zaffran, alias Martin Winckler

Communication

« L’immédiat dans la fulgurance de toujours, ou quand arrêter notre processus thérapeutique. » - Claude Spicher (2021)

Dans notre pratique quotidienne, les patient·es que nous accueillons sont des survivant·es, sur le seuil de la mort, bloqué·es dans l’espace-temps à l’heure de l’accident. Iels n’ont peut-être plus qu’une identité, celle d’une personne souffrante, expérience à la fois sensorielle et émotionnelle, organique et psychologique, somatique et sémantique.

En tant que soignant·e, nous devons être avant tout des acteur·trices du changement en mouvement pour écouter avec attention (entendre), parler avec clarté, voir au-delà (contempler), comprendre (empathie) afin de définir nos stratégies thérapeutiques.

C’est un incessant aller-retour entre le „Ich und Du”, essence d’une relation, où la matière et le sens en font la substance. C’est accepter et favoriser ces silences habités, parfois assourdissants, mais tellement salutaires, car il n’est pas urgent de décider, d’agir. « Ce sont ces instants hors du temps où dans l’invisible quelque chose se déploie et se tend. » (Lim, 2016).

Photographie : Cécile Ravenel RSDC®

Photographie : GD

Être thérapeute, c’est comprendre le contexte bio-psycho-socio-spirituel, comprendre la douleur en tant qu’expérience sensorielle ET émotionnelle, qui dépend de facteurs dont nous devrions tenir compte.

Photographie : GD

 C’est aussi adopter le paradigme d’une d’éthique conséquentialiste : seul compte le résultat de nos actes, perçus de manière bonne ou mauvaise par le patient, tant physiquement qu’émotionnellement. En osant demander « Qu’est-ce que vous ne voulez pas que l’on vous fasse, qu’est-ce qui vous fait peur ? », nous confions aux patient·es la responsabilité de nous dire comment iels ressentent notre intervention, en instaurant une symétrie, une horizontalité des pouvoirs et des savoirs.

Les soigné·es ont une attente de bienveillance où subsiste une petite crainte de nuisance possible de la part des soignant·es. Cette peur fait partie intégrante de notre être et nous contraint. Si nous ne tenons pas compte de ces peurs, nous contraignons les patient·es.

Photographie : GD

« Pour me soigner au mieux, physiquement, moralement et émotionnellement, tu mettras en œuvre ton savoir, ton savoir-faire, ton intelligence et ton humanité en prenant garde, en tout temps, à ne pas me nuire. » (Winckler, 2019, 2023)

Être conscient·e qu’en plus de nos techniques et connaissances théoriques, nos langages verbal, paraverbal ou non verbal, nos comportements peuvent avoir un effet placebo ou a contrario nocebo. Abandonnez les comparatifs, définissez les croyances de la personne qui se cachent derrière les phrases telles que « Je n’en veux pas, je n’y crois pas … » ! « Le premier médicament d’une personne qui soigne, c’est elle-même. » (Winckler, 2023)

N’utilisez pas le mot « douleurs », mais des mots plus descriptifs, comment, où, quand… « Nommer, c’est reconnaître et cela fait du bien. » (Murray, 2019), en intégrant que la description des symptômes appartient aux soigné·es.

Enfin, être soignant·e, c’est aussi oser « se mettre debout pour prendre la parole ». Pour faire connaître et reconnaître notre pratique dans nos communications, et parce que chaque concept est évocateur et indicateur, il est nécessaire de déterminer un mot d’accroche enrobé dans une phrase “take home message”. Il est aussi nécessaire d’adapter le contenu de nos rapports en fonction des différent·es intervenant·es gravitant autour des patient·es qui nous sont confié·es.

Photographies : GD

Mercredi soir, à l’heure de se dire au revoir et de reprendre le chemin de nos foyers, chacun·e d’entre-nous a été submergé·e par un silence reconnaissant rayonnant de gratitude : pour les précieux échanges à chaque instant, durant la formation, les pauses gourmandes, la soirée festive du mardi ou en lien avec notre communauté de pratique sur le forum, pour l’enrichissement aussi bien humain que théorique dans cet espace de réflexion en dehors de nos préoccupations quotidiennes nous permettant d’être juste , présent·e au présent. « Oser braver l’instant ! L’entendre qui respire ! » (Singer, 2006)

Photographies: Guyane Mireault RSDC®

Merci beaucoup Prof Sibele de Andrade Melo Knaut, Marc Zaffran (alias Martin Winckler), Claude Spicher, Florine Etiévant et Mylène Kientzi. Merci à toutes les personnes qui ont contribué à l’organisation de ces trois merveilleuses journées de formation. Un grand merci également aux dix-huit soignée·s et leurs thérapeutes RSDC© qui ont accepté notre présence lors de leur séance de traitement, ainsi qu’aux vingt-quatre RSDC© pour leur participation active et passionnée.

 

Liste des références

  • Lim, H.J. (2016). Le son du silence. Paris : Albin Michel ;

  • Murray, E. (2019). GUESTEDITORIAL Dés-altération. e-News Somatosens Rehab, 16(4), 113-118. Téléchargeable (08/05/2023) : https://www.neuropain.ch/sites/default/files/e-news/e-news_somatoses_rehab_16_4_0.pdf#page=2

  • Singer, Ch. (2006). Rastenberg. Paris : Albin Michel ;

  • Spicher, C. (2021). EDITORIAL Entendre les symptômes en remontant le fleuve des souvenirs par un récit à deux voix : anamnèse clinique. Somatosens Pain Rehab, 18(3), 64-70. Téléchargeable (08/05/2023) : https://www.neuropain.ch/sites/default/files/e-news/somatosens_pain_rehab_18_3.pdf#page=2

  • Winckler, M. (2023). EDITORIAL Le premier médicament des personnes qui soignent. Somatosens Pain Rehab, 20(1), 2-4 Téléchargeable (08/05/2023) : https://www.somatosenspainrehab.com/articles/le-premier-mdicament-des-personnes-qui-soignent

  • Winckler, M. (2019). L’Ecole des soignant·es. Paris : P.O.L (pp. 145 – 147). Téléchargeable en 10 langues (08/05/2023) : https://www.neuropain.ch/sites/default/files/e-news/la_charte_des_soignees_somatosens_pain_rehab_20_1.pdf

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